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Hermann Kamte : Modèle d’Une Nouvelle Génération d’Architectes

Figure émergente mais déjà connue de l’architecture en Afrique et dans le monde, Hermann Kamte, 31 ans, est un “prématuré” dans le monde du 1er art. Considéré comme l’un des pionniers de la structure en bois, il a acquis sa notoriété en remportant de prestigieux prix internationaux.

Par Patrick Ndungidi


On le sait, un architecte doit généralement patienter plusieurs années avant de se forger une réputation. C’est pourquoi le cas d’Hermann Kamte est une véritable exception. Dès la fin de ses études à l’École africaine des métiers de l’architecture et de l’urbanisme (EAMAU) de Lomé (Togo), le jeune architecte camerounais s’était déjà fait un nom. « Pour moi, les choses se passent plutôt vite et s’enchaînent, reconnaît-il. Même si une majorité de projets restent en phase d’études et ou d’idées, nous observons une augmentation de notre portfolio ». Et le patron de l’agence Hermann Kamte & Associates (HKA), qu’il a créée en 2018 à Yaoundé (Cameroun), de citer la future gare routière de Foumban, dans l’ouest du pays, le collège Jean Tabi (Yaoundé), ainsi que plusieurs résidences privées. Ces réalisations s’ajoutent aux projets architecturaux d’envergure qu’il a déjà signés un peu partout dans le monde, et pour lesquels il a remporté des prix majeurs sur chaque continent. Sa création emblématique est la « Lagos Wooden Tower », une tour résidentielle en bois de plus de 40 000 m2, conçue pour un quartier résidentiel de luxe à Lagos (Nigéria). Réalisé en 2016, le projet a remporté une dizaine de prix prestigieux à travers le monde, notamment l’American Prize of Architecture et le prix de l’Identité culturelle au Festival mondial de l’architecture, en 2017.

« Sa création emblématique est la Lagos Wooden Tower, une tour résidentielle en bois de plus de 40 000 m2, conçue pour un quartier résidentiel de luxe à Lagos (Nigéria) »

The Forgotten: Dead or Alive (« Les oubliés : Morts ou vifs ») est une proposition de régénération de l’eau du lac Tchad mourant par l’installation d’un centre de dessalement sur le site.


L’Architecte Qui Voulait Devenir Ingénieur

Plus jeune, Hermann Kamte ne rêvait pas de devenir architecte, mais plutôt bâtisseur. Sa passion pour la construction s’affine en 2005, via la célèbre émission Mégastructures de légende, de National Geographic. Il raconte : « Je voulais réaliser des projets impressionnants, mais je me focalisais beaucoup plus sur la construction, car l’architecture n’était pas un domaine très connu au Cameroun. À ce jour, elle reste d’ailleurs toujours mal connue ». Après l’obtention de son baccalauréat, il s’inscrit à l’université de Ngaoundéré, où il effectue une première année en faculté de physique. C’est là qu’il découvre l’existence de l’EAMAU, dont il passe le concours d’entrée un peu par curiosité… mais avec succès. Et c’est finalement dans cette école, au cours de ses cinq années d’étude (2011- 2016), que sa passion pour ce domaine grandit. Particulièrement brillant lors des ateliers d’architecture, il commence à participer à des concours internationaux, seul ou en équipe. « L’architecture, c’est la compétition au sens de la destruction créative, dit-il. Il me fallait donc me confronter aux autres, et aux meilleurs dans le monde ».


La Démarche De Recherche

Peu à peu, Hermann Kamte réalise que ses idées sont novatrices, en phase avec les tendances. Il explique : « J’ai appris à travailler mes idées, mon endurance, le processus projet, etc. Quand je réalise un projet, la partie recherche me prend 60 à 80 % du temps. C’est le plus important. C’est ce qui donne un côté raffiné au projet. Quand vous avez suffisamment travaillé sur la démarche de recherche, quel que soit ce qui en ressort, vous arrivez à connecter les gens autour de vos idées, car la profondeur du travail finit par intégrer des éléments qui interpellent… II faut contrôler ce qui est possible, accepter que l’imperfection puisse être la subtile découverte et accepter l’inattendu ». Après avoir obtenu son master en architecture avec la mention « distinction » (et la meilleure note attribuée par le jury de fin d’études), plusieurs opportunités se présentent à lui. Au même moment, il remporte le concours organisé par Tirana Architecture Week (TAW), en Albanie, pour la rénovation d’un quartier populaire de la capitale albanaise. Avec les 1 100 euros de récompense, Hermann Kamte décide de retourner au Cameroun pour réaliser un stage au cabinet Urbatech Conseils. Nommé à la tête du département architecture, il y travaille sur la tour de la Direction générale des impôts (DGI) et sur le complexe sportif de la Mundi.

« II faut contrôler ce qui est possible, accepter que l’imperfection puisse être la subtile découverte et accepter l’inattendu»

Haute de 87 mètres, la Lagos Wooden Tower est le premier gratte-ciel en bois proposé en Afrique pour Lagos (Nigéria), la ville la plus peuplée du continent. Elle se situe à Ikory, un quartier résidentiel de luxe.

Des Projets Prestigieux À Travers Le Monde

Après une année de stage, il intègre l’Ordre des architectes du Cameroun (comme le stipule la loi), recevant à l’occasion une flopée de félicitations de la part du jury. Il est vrai que depuis l’obtention de son diplôme en 2016, Hermann Kamte a déjà reçu plusieurs récompenses internationales, qui ont pointé sa vision particulière en matière de développement durable, d’identité culturelle et de technologie. Il a également participé à des expositions collectives à travers le monde, l’une des plus prestigieuses étant la « Lagos Wooden Tower », présentée à la Roca London Gallery. En 2018, alors que son agence présente un projet d’immense parc aquatique à Dubaï (« Fine Flower – Dubaï Heart »), il est invité par l’Union africaine à l’Africa Forum à Sharm El Sheikh (Égypte), où il est co-panéliste aux côtés des présidents Paul Kagame (Rwanda) et Abdel Fattah al-Sissi (Égypte). Autant dire que l’événement booste la carrière du jeune architecte, en Afrique et au-delà.

« L’architecture, c’est la compétition au sens de la destruction créative. Il me fallait donc me confronter aux autres, et aux meilleurs dans le monde »


Deux À Trois Ans Par Projet

Pourtant, et même si ses réalisations parlent pour lui, Hermann Kamte estime qu’il lui faudra encore une dizaine d’années avant d’être un architecte véritablement établi. Ce, d’autant que ses projets les plus connus sont, pour l’heure, des travaux de développement et de recherche. « C’est important d’être connu, mais il est nécessaire d’exécuter des projets qui portent votre vision à travers le monde », souligne-t-il. « À l a fin de vos études, ajoute-t-il, vous avez des idées, mais leur formalisation prend du temps. À c e jour, les projets que j’ai exécutés prennent en moyenne deux à trois ans, exception faite des résidences privées ». Aujourd’hui, s’il ambitionne de travailler sur chaque continent, le jeune architecte souhaite néanmoins que sa plus belle œuvre soit réalisée en Afrique, et principalement au Cameroun. Preuve de son profond attachement à ses racines.


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