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Junior MAKABU, au sommet de la boxe mondiale

JUNIOR MAKABU ©DR

Forbes Afrique a rencontré le boxeur congolais Junior Makabu dans le cadre d’une visite qu’il effectuait en France. Dans cet entretien exclusif, nous revenons pour vous sur son parcours et ses aspirations. 

Par  Afaf Aboudoulama

Le 31 janvier 2020, Junior Ilunga Makabu entrait dans l’histoire de la boxe africaine en devenant le premier Congolais champion du monde de boxe anglaise au sein du WBC (World Boxing Council), l’une des quatre grandes fédérations régissant le Noble Art. Une victoire emportée de haute lutte face au Polonais Michal Cieślak, d’autant plus mémorable qu’elle sanctionnait le premier Championnat du monde organisé à Kinshasa depuis le légendaire combat entre Mohamed Ali et George Foreman en 1974. Le 30 septembre 2022, « le Léopard » devait défendre son titre pour la troisième fois face au champion WBA Ryad Merhy, mais celui-ci s’est finalement retiré. À l’heure où nous écrivions ces lignes, le challenger de Makabu pour ce match d’unification prévu à Kinshasa n’était toujours pas connu… 

Forbes Afrique : Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs qui ne vous connaîtraient pas ?

Junior Makabu : Je suis Junior Makabu Ilunga, né à Kananga dans la province du Kasaï-Central, en République démocratique du Congo. Avant de devenir boxeur pro, j’ai commencé par le football. Mon père avait une équipe que j’ai emmenée en deuxième division. Très jeune, je me distinguais par mes qualités de buteur. Lorsque j’ai quitté ma ville natale pour aller étudier à Kinshasa, je me suis peu à peu détaché du ballon rond pour m’investir à fond dans le Noble Art, que je pratiquais depuis l’âge de neuf ans. J’ai intégré assez rapidement la sélection nationale et commencé à gagner des combats chez moi, avant de décider de partir en Afrique du Sud pour développer ma carrière auprès de Nick Durandt. 

Forbes Afrique : Qu’est-ce qui vous a fait passer du football à la boxe ?

Junior Makabu : Il faut préciser que je viens d’une famille de boxeurs : mon grand-père était un bon pugiliste et mon père, Makabu Foreman, a été champion de RDC. Afin de perpétuer la tradition, j’ai commencé à entraîner mon frère cadet Martin Bakole Ilunga, qui est lui aussi passé pro (champion du monde 2021 et dans le Top 10 des poids lourds WBC, WBA et IBF, NDLR), ainsi que mes enfants, également pratiquants, mais pas encore professionnels. Le déclic s’est produit lorsque je suis arrivé à Kin’, en réalisant que c’est là, dans cette ville et dans mon pays, qu’avait eu lieu le « combat du siècle » opposant Mohamed Ali à George Foreman. Ça a été une vraie révélation, et je me suis dit que j’aimerais accomplir quelque chose d’aussi grand. C’est ce qui m’a poussé à m’investir à fond. Je suis parti en Afrique du Sud en 2006 avec ce rêve en tête, et quand j’ai annoncé à Nick que je voulais décrocher la ceinture WBC, je ne vous cache pas qu’il a ri, car je n’étais pas encore assez bon. Mais j’ai persévéré, je me suis entraîné dur et j’ai fini par ramener cette ceinture. Nick est malheureusement décédé, et j’ai continué l’aventure avec son fils Damien. C’est important pour moi de rester fidèle à ceux qui m’ont soutenu à mes débuts, et de m’entourer de personnes qui partagent les mêmes valeurs que moi, comme mon manager Tarik Saadi, que j’ai rencontré en 2012 et qui est lui aussi très attaché à la loyauté et au respect d’autrui. 

Forbes Afrique : Vous semblez avoir à cœur de replacer l’Afrique au centre de l’arène mondiale de la boxe…

Junior Makabu : Vous savez, la plupart des Africains, quand ils « se trouvent », oublient d’où ils viennent, leurs racines, leurs valeurs. Quand je pense à ce qu’a traversé mon pays, je me dis qu’à mon niveau et à travers le Noble Art, je peux faire bouger les choses. Aujourd’hui le Congo, ce n’est pas que la politique et les minerais, c’est aussi et de nouveau une nation de boxe. Le monde convoite nos richesses, mais elles ne sont pas que matérielles, et c’est à nous de montrer ce visage-là du continent ; le visage d’une Afrique qui gagne. C’est pour ça que ce match d’unification à Kinshasa me tient tellement à cœur, et que je veux emmener davantage de grandes rencontres de boxe en Afrique : depuis le début de ma carrière pro, je n’ai combattu que quatre fois dans mon pays. Cela doit changer et ça ne peut passer que par nous.

Forbes Afrique : Quels sont vos projets pour la jeunesse ?

Junior Makabu : Les Congolais sont amateurs de boxe depuis longtemps (la RDC a produit de très bons pugilistes et plusieurs grands boxeurs, comme Estelle Mossely, sont issus de ce pays, NDLR), mais nos sportifs n’ont jamais bénéficié de politique d’accompagnement leur permettant de s’imposer à l’international. Depuis l’accession au pouvoir du président Tshisekedi, les choses ont évolué. C’est notamment grâce à son aide que j’ai pu mettre sur pied la Fondation Junior Makabu. Avec l’académie de boxe que nous avons créée au sein de cette fondation, les jeunes peuvent désormais profiter d’un entraînement et d’un encadrement de qualité. La jeunesse africaine n’a pas besoin de beaux discours, mais d’actions concrètes. Cela s’applique aussi au sport, qui pâtit d’un sérieux manque d’infrastructures. Nous devons préparer la relève en mettant notre expérience et nos moyens à profit.

JUNIOR MAKABU EN COMPANIE DU PRESIDENT FELIX TSHISEKEDI ©DR.PNG

Junior Makabu en bref

Né le : 8 novembre 1987 à Kananga

Catégorie : poids lourd-léger (cruiserweight)

Taille : 183 cm

Allonge : 188 cm

Manière : gaucher

Débuts professionnels : 20 juin 2008Palmarès : 31 combats, 29 victoires dont 25 par KO, 2 défaites ; champion du monde lourds-légers WBC face au Sud-Africain Thabiso Mchunu (29 janvier 2022) ; champion du monde lourds-légers face au Polonais Michal Cieślak (31 janvier 2020) ; champion WBC Silver (l’équivalent du titre de vice-champion du monde au sein du WBC) face au Russe Dmitry Kudryashov (16 juin 2019).

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