Première filiale africaine de l’opérateur français par le chiffre d’affaires, Orange Côte d’Ivoire officiellement introduite à la cote de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM). Décryptage
Par Léopold Muta
Initiée par l’ancien Premier ministre ivoirien, feu Amadou Gon Coulibaly, qui prévoyait de la conclure avant
la fin de l’année 2020, l’opération d’introduction en bourse de l’opérateur Orange Côte d’Ivoire a été officialisée le 30 décembre 2022 à la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) d’Abidjan. Organisée en présence du ministre ivoirien de l’Économie et des Finances, Adama Coulibaly, du directeur général d’Orange Côte d’Ivoire, Mamadou Bamba, et du directeur général de la BRVM, Félix Edoh Kossi Amenounvé, la cérémonie de première cotation d’Orange Côte d’Ivoire fait suite à la cession, début décembre, d’une majorité des parts de l’État ivoirien dans le capital de l’entreprise. Le gouvernement dirigé par le Premier Ministre Patrick Achi avait alors cédé 9,95 % du capital d’OCI sur les 14,95 % qu’il détenait. Au total, ce sont plus de 14,99 millions d’actions qui ont été mises en vente par le gouvernement ivoirien à la BRVM pour un prix unitaire de 9 500 francs CFA. À cela s’ajoutent 15,14 millions de titres cédés par les autres actionnaires d’OCI — notamment Sifcom, la holding détenue par la famille Billon —, la réglementation boursière du marché régional ouest-africain imposant un capital flottant minimum de 20 % pour toute introduction en bourse sur son compartiment principal. Une opération « […] sursouscrite, avant terme, à hauteur de 132 % », preuve de « l’appétence du marché pour le titre », selon le directeur général d’Orange Côte d’Ivoire, Mamadou Bamba. À la tête de l’entreprise depuis 2010, le dirigeant a de fait salué la capacité du marché « à absorber » le volume important de titres cédés. Dans les faits, la filiale africaine phare du groupe français de télécommunications Orange (plus de 28 millions de clients répartis entre la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et le Liberia pour un chiffre d’affaires de 965 milliards de francs CFA soit 1,46 milliard d’euros en 2021), est devenue la première capitalisation boursière de la zone UEMOA au terme de cette journée d’introduction, avec une valorisation de 1 538 milliards de francs CFA (2,34 milliards d’euros), devant la Sonatel (1 520 milliards de francs CFA).
Plus de 140 milliards de francs CFA levés par l’état Ivoirien
Pilotée par les sociétés d’intermédiation EDC et BNI Finances, cette nouvelle introduction en bourse aura fait plusieurs gagnants. Au niveau de la BRVM, l’opération aura permis à la place financière ouest- africaine de renforcer son attractivité auprès des investisseurs, porter sa capitalisation totale à 7 487 milliards de francs CFA (11,4 milliards d’euros) et conforter sa position de sixième place financière du continent par la valorisation. Surtout, l’entrée en bourse d’Orange Côte d’Ivoire est une belle opération pour le gouvernement ivoirien puisque la cession de ses titres lui aura rapporté plus de 140 milliards de francs CFA (215 millions d’euros). Des recettes de nature exceptionnelle et qui auront en grande partie servi à boucler le budget de 2022, déficitaire de près de 900 milliards de francs CFA. Autres gagnants, les salariés d’Orange Côte d’Ivoire, qui ont bénéficié d’un prix unitaire préférentiel de 7 600 francs CFA par titre ; une décote de 20 % par rapport au montant payé par le grand public et les institutionnels. Avec une action évoluant autour de 10 200 francs CFA à l’heure où nous mettions ce numéro sous presse, les collaborateurs de l’opérateur se retrouvaient d’ores et déjà avec une plus-value latente de 34 %. Quant à la société nouvellement cotée en bourse, qui n’a pas levé de fonds via cette introduction, la direction explique que le principal objectif visé était d’abord « d’affermir la notoriété de l’entreprise vis-à-vis de ses clients et partenaires ».
Réinventer le business model
Reste une inconnue, majeure : l’impact de l’évolution rapide du marché des télécoms sur les perspectives de croissance de l’entreprise, qui influera par ricochet sur la valorisation à long terme de celle-ci. De fait, bousculés
par l’arrivée de nouveaux concurrents, notamment sur le segment du mobile money, les opérateurs historiques tels qu’Orange Côte d’Ivoire doivent « réinventer leur business model », concède Mamadou Bamba. Le patron de la société rappelle toutefois « [qu’une] stratégie de reconquête est déjà actée » avec le développement de nouveaux relais de croissance tels que « la fibre, le mobile banking et les paiements marchands ».
« La filiale africaine phare du groupe français de télécommunications Orange est devenue la première capitalisation boursière de la zone UEMOA au terme de cette journée d’introduction, avec une valorisation de 1 538 milliards de francs CFA (2,34 milliards d’euros) »