Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Le média de ceux qui construisent l'Afrique d'aujourd'hui et de demain

Le MWC Kigali 2025, Baromètre Des Ambitions Numériques Africaines

L’Afrique est en pleine transformation numérique. Au-delà de la simple adoption des technologies, le continent construit ses propres capacités d’innovation et cherche à réguler, sécuriser et exporter ses solutions digitales. La prochaine édition du MWC Kigali (du 21 au 23 octobre 2025) illustrera cette dynamique, en mettant en lumière l’inclusion numérique, le développement des startups locales et la coopération public-privé pour une croissance digitale durable.

Dounia Ben Mohamed


L’Afrique subsaharienne affiche une croissance rapide de sa connectivité mobile et Internet. « L’inclusion numérique est clé, souligne Caroline Mbugua, directrice de la politique publique chez GSMA Africa. Nous devons nous assurer que chacun puisse participer à l’économie digitale africaine ». Dans son  Rapport 2025 sur l’état de la connectivité Internet mobile, la GSMA1 fournit les derniers chiffres globaux : 4,7 milliards de personnes, soit 58 % de la population mondiale, utilisent désormais Internet mobile avec leur propre appareil, tandis que 38 % (3,1 milliards) sont non connectées, bien qu’elles vivent dans des zones couvertes (« usage gap », soit écart d’utilisation en français). L’écart de couverture (« coverage gap ») reste de 4 % : ce sont 300 millions de personnes qui n’ont pas accès à l’Internet mobile. En Afrique subsaharienne, seuls 25 % des habitants utilisent l’Internet mobile et 10 % restent hors couverture.

« En Afrique subsaharienne, seuls 25 % des habitants utilisent l’Internet mobile et 10 % restent hors couverture »

L’accessibilité économique est également un frein : un appareil d’entrée de gamme coûte en moyenne 16 % du revenu mensuel, et jusqu’à 48 % pour les 20 % les plus pauvres.

« Un appareil d’entrée de gamme coûte en moyenne 16 % du revenu mensuel »


Industrie Mobile : Un Potentiel de 280 Milliards de Dollars d’Ici 2030

Ces chiffres montrent que malgré les progrès, de nombreux Africains restent exclus du numérique. L’industrie mobile contribue pourtant à hauteur de 8 % du PIB en Afrique subsaharienne (140 milliards de dollars) et soutient 4 millions d’emplois, avec un potentiel de 280 milliards de dollars d’ici 2030 si les politiques adaptées sont mises en place.

Le Digital Africa Index 2024 de la GSMA2 identifie des leaders comme le Kenya, Maurice, les Seychelles et l’Afrique du Sud, avec un développement numérique supérieur à 50 %. Mais pour la majorité des pays, des efforts restent nécessaires pour développer l’accès, l’utilisation et la maîtrise des technologies numériques.

« Des initiatives comme la suppression de la taxe sur les smartphones à bas prix en Afrique du Sud ont montré leur efficacité »

« Les smartphones sont la passerelle vers le monde digital », rappelle Caroline Mbugua. Le principal frein reste l’accessibilité économique. Des initiatives comme la suppression de la taxe sur les smartphones à bas prix en Afrique du Sud ont montré leur efficacité. Le manque de compétences numériques, notamment chez les femmes, les jeunes et les populations rurales, constitue un autre obstacle majeur. Des programmes ciblés, incluant l’IA et les technologies avancées, sont essentiels pour réduire cette fracture. Enfin, le contenu local et pertinent reste insuffisant, nécessitant des applications et services dans les langues locales, et des fonds de service universel (FSU) optimisés.


Stabilité Réglementaire et Clarté des Licences

Surtout, la volonté politique reste déterminante. La régulation est essentielle pour stimuler l’investissement et l’innovation. Selon la Commission de l’Union africaine, des politiques harmonisées et prévisibles sont cruciales pour attirer les investisseurs et sécuriser les projets numériques. L’initiative PRIDA (Policy and Regulation Initiative for Digital Africa)3 renforce la capacité des États à gérer l’Internet, faciliter l’accès universel et protéger les consommateurs.

« L’initiative PRIDA (Policy and Regulation Initiative for Digital Africa)3 renforce la capacité des États à gérer l’Internet, faciliter l’accès universel et protéger les consommateurs »

Des exemples concrets de succès incluent le Nigéria, où la désignation des infrastructures télécoms comme « infrastructures nationales critiques » a renforcé la confiance des investisseurs ; et le Kenya, qui a réformé son fonds de service universel pour accélérer la couverture rurale. Ces mesures illustrent comment la stabilité réglementaire et la clarté des licences peuvent transformer la connectivité en opportunité économique et en moteur d’innovation.

« La stabilité réglementaire et la clarté des licences peuvent transformer la connectivité en opportunité économique et en moteur d’innovation »


Start-Ups et Innovation Locale : Moteur de l’Écosystème

Il en est de même pour le soutien aux startups, véritable moteur de la souveraineté numérique africaine. En 2025, ces structures ont levé plus de 2,2 milliards de dollars, dont 140 millions de dollars en septembre, signalant une reprise de la confiance des investisseurs. Le GSMA Innovation Fund, les accélérateurs et les hubs technologiques permettent aux jeunes entreprises de développer des solutions adaptées aux besoins locaux. Caroline Mbugua insiste : « Les hubs soutenus par les opérateurs et la GSMA favorisent les solutions AI, IoT et analytiques pour les marchés africains, conçues par et pour les Africains ».

« En 2025, ces structures ont levé plus de 2,2 milliards de dollars, dont 140 millions de dollars en septembre, signalant une reprise de la confiance des investisseurs »

Ces startups soutiennent des secteurs critiques : finance, santé, agriculture, éducation et énergie. Mobile Money, M-Pesa, Airtel Money ou Orange Money facilitent l’inclusion financière et l’accès aux services, réduisant les coûts de transaction et stimulant les PME. Dans la santé, des projets de télémédecine, comme un pilote mené par une université de Singapour à Kumasi (Ghana), améliorent l’accès aux soins en zones isolées.

Plus largement, le secteur privé joue un rôle crucial dans le développement de l’infrastructure numérique. Des entreprises comme Visa ont investi 57 millions de dollars dans un centre de données à Johannesburg, soulignant l’importance de la souveraineté numérique. Par ailleurs, la Banque mondiale a investi 100 millions de dollars dans Raxio Group pour la construction de centres de données en Afrique, visant à améliorer la connectivité et la sécurité des données.

Le MWC Kigali offrira une plateforme pour ces startups et ces entreprises, facilitant les partenariats et l’accès aux financements.


Le MWC Kigali : Catalyseur d’Ambitions Numériques

Le Mobile World Congress (MWC), grand rendez-vous annuel de la GSMA, dont l’édition 2025 se tiendra à Kigali du 21 au 23 octobre, se veut plus qu’un simple salon technologique : il constitue un baromètre des ambitions numériques africaines, où convergent décideurs publics, acteurs privés et innovateurs locaux. L’événement permettra de discuter de l’inclusion numérique, de la cybersécurité, de la régulation et du développement des startups, et d’évaluer l’état de la transformation digitale du continent.

« Le Mobile World Congress (MWC), grand rendez-vous annuel de la GSMA, dont l’édition 2025 se tiendra à Kigali du 21 au 23 octobre, se veut plus qu’un simple salon technologique : il constitue un baromètre des ambitions numériques africaines »

Les panels ministériels mettront en avant les expériences de pays comme le Kenya, l’Afrique du Sud et le Nigéria pour guider les réformes et accélérer la transition numérique. Les startups et hubs locaux, soutenus par des programmes comme le GSMA Innovation Fund, trouveront dans le MWC Kigali une plateforme pour nouer des partenariats, attirer des investissements et tester des solutions adaptées aux besoins africains.

En réunissant décideurs, opérateurs, investisseurs et innovateurs, le MWC Kigali 2025 illustre l’interdépendance entre politiques publiques, infrastructures et innovation locale, et montre comment l’Afrique peut construire une transformation digitale inclusive, durable et souveraine. Chaque avancée technologique, initiative de start-up et réforme réglementaire devient ainsi un indicateur concret des ambitions numériques du continent, faisant du MWC Kigali un point de référence incontournable.


1.La GSM Association est une association professionnelle à but non lucratif qui représente les intérêts des opérateurs de réseaux mobiles du monde entier.

2. L’indice Afrique numérique (ou DAI, de l’anglais Digital Africa Index).

3. Initiative conjointe de l’Union africaine (UA), de l’Union européenne (UE) et de l’Union internationale des télécommunications (UIT), avec le soutien du Programme panafricain financé par l’UE. 


Partager l’article


Ne manquez aucun de nos articles.

Inscrivez-vous et recevez une alerte par email
à chaque article publié sur forbesafrique.com

Bonne lecture !

Profitez de notre abonnement illimité et sans engagement pour 5 euros par mois

√ Accédez à tous les numéros du mensuel Forbes Afrique de l'année grâce à notre liseuse digitale.
√ Bénéficiez de l'accès à l'ensemble des articles du site forbesafrique.com, y compris les articles exclusifs.