Acteur pivot entre l’Afrique, l’Europe et le monde arabe, le Maroc façonne une trajectoire singulière dans l’espace économique africain et mondial. Destination attractive pour les visiteurs comme pour les investisseurs, le pays poursuit sa modernisation économique et sociale à travers la mise en œuvre de grands plans sectoriels portant sur les infrastructures, le numérique, les énergies renouvelables, mais également sur la création de hubs portuaires stratégiques. Sa vitalité réside aussi dans son rayonnement culturel et la mobilisation de son capital humain. Plus qu’un simple relais de croissance du continent, le royaume incarne une promesse d’intégration, d’influence et de mutation, tirant parti de ses forces vives pour rester compétitif dans la bataille des marchés mondiaux. Gros plan sur un pays entre traditions et modernité, qui fait figure de symbole mondial du rayonnement africain.
Analyse de Dounia Ben Mohamed – Dossier Coordonné par Marie-France Réveillard
Tous les indicateurs convergent : la bonne santé du Maroc repose sur des fondations macroéconomiques solides et une gouvernance exemplaire. D’après les dernières projections du Fonds monétaire international (FMI), le PIB réel devrait progresser de 3,9 % en 2025, après 3,2 % en 2024, malgré un contexte agricole difficile. Une performance qui traduit la résilience du modèle marocain, porté par l’investissement public, la demande intérieure et la diversification des secteurs. Selon le dernier rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) publié en juin dernier, les investissements directs étrangers (IDE) ont bondi de 55 % en 2024, atteignant 1,64 milliard de dollars. Un signe tangible de confiance dans un pays où les politiques macroéconomiques, la stabilité du dirham et la maîtrise de la dette constituent des atouts majeurs. Le déficit public devrait se stabiliser à 3,5 % du PIB, avec un ratio d’endettement autour de 64 %. « Le Maroc bénéficie d’infrastructures modernes, d’une stratégie de diversification et d’un cadre institutionnel stable», résume une étude du cabinet Coface, spécialisé dans l’assurance-crédit.
Un Hub Économique Continental
Fort de sa stabilité politique et de sa position stratégique, le Maroc s’impose comme un hub économique régional. Des multinationales comme Renault, Safran, IBM ou Huawei y ont consolidé leur présence. Ces investissements structurent les filières de l’automobile, de l’aéronautique, de l’offshoring numérique, de l’énergie verte et des services financiers. La consolidation de ce positionnement passe également par une politique budgétaire rigoureuse et une gouvernance financière reconnue. Le cadre des finances publiques montre une réduction du déficit et un ratio d’endettement public maîtrisé, ce qui renforce la crédibilité du Maroc auprès des bailleurs et des marchés. Le rapport Coface note que « le ratio d’endettement public devrait progressivement se réduire ». « Le Maroc a démontré une grande résilience macroéconomique. L’inflation reste sous contrôle, la dette publique est maîtrisée et le dirham stable. Les réformes en cours– nouvelle Charte de l’investissement, fonds Mohammed VI, protection sociale– constituent des signaux forts de confiance », analyse Zakaria Fahim, associé gérant de BDO Maroc.
« Fort de sa stabilité politique et de sa position stratégique, le Maroc s’impose comme un hub économique régional »
Les Secteurs Moteurs : Industrie, Tourisme et Finance
À cela s’ajoute une diversification économique qui renforce la résilience du pays. Celui-ci s’appuie d’ores et déjà sur des filières puissantes : le phosphate, dont il détient 70 % des réserves mondiales, mais aussi l’automobile et l’aéronautique. L’industrie automobile produit plus de 700 000 véhicules par an, génère 14 milliards de dollars d’exportations et emploie 220 000 personnes. Dans l’aéronautique, Safran a investi 200 millions d’euros dans une nouvelle chaîne d’assemblage près de Casablanca, confirmant la montée en gamme industrielle du pays. Le tourisme poursuit sa relance : 17 millions de visiteurs en 2024, consolidant le Maroc comme première destination francophone d’Afrique. La place financière Casablanca Finance City (CFC) se veut la première plateforme de services financiers en Afrique, abritant plus de 200 entreprises internationales.
Transition Énergétique Et Numérique : Le Nouveau Cap
Mais comme le souligne Zakaria Fahim, « maintenir le leadership en IDE implique de ne pas se reposer sur ses lauriers et de continuer à renforcer la compétitivité locale ». À cet effet, le royaume affiche de nouvelles ambitions : il avance sur la voie de la transition énergétique et du numérique inclusif, et envisage son avenir sous le signe de la durabilité. La ministre Leila Benali a présenté, le 23 octobre 2025, le décret encadrant l’autoproduction d’électricité, un jalon clé vers la souveraineté énergétique. Le Maroc se positionne aussi sur la mobilité électrique et l’hydrogène vert, domaines considérés comme « une véritable opportunité économique » par le ministre de l’Industrie, Ryad Mezzour. Enfin, avec le plan « Maroc Digital 2030 », le royaume veut faire du numérique un levier de compétitivité, d’inclusion et de souveraineté technologique. L’ambition : positionner le pays parmi les leaders africains de l’innovation et de la transformation digitale. Le Maroc vient ainsi de lancer le Digital for Sustainable Development Hub (D4SD), un hub arabo-africain doté de 38 millions de dollars, soutenu par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Pour Amal El Fallah Seghrouchni, ministre déléguée à la Transition numérique, « le Maroc porte la vision d’un avenir numérique qui ne laisse personne de côté ». «L’industrialisation intelligente, la digitalisation et la transition énergétique sont les moteurs du Maroc de demain », résume pour sa part Zakaria Fahim.
CAN 2025 Et Coupe Du Monde 2030 : Vitrines de la Nouvelle Ambition Marocaine
Les grands événements sportifs à venir illustrent la stratégie de visibilité mondiale du royaume. En vue de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2025 et la Coupe du monde 2030, coorganisée avec l’Espagne et le Portugal, le Maroc a débloqué 9 milliards d’euros pour moderniser ses infrastructures. Ces événements devraient générer 8 à 10 milliards de dollars de retombées, créer plus de 330 000 emplois et stimuler le PIB de 2 à 3 % supplémentaires par an. Reste que la réussite économique ne masque pas les défis : dépendance à l’agriculture, chômage des jeunes à 35,8 %, inégalités régionales… À ce titre, la Loi de Finances 2026 affiche une orientation sociale assumée, avec des hausses significatives pour l’éducation et la santé. « C’est une décision courageuse et stratégique, souligne Zakaria Fahim. Elle permettra de reconfigurer notre capital humain, de créer une école plus connectée et un système de santé résilient : voilà des fondations durables pour la compétitivité ». Et de conclure : « Le Maroc a tout pour devenir un hub africain de l’entrepreneuriat et de l’impact. La souveraineté économique ne se décrète pas : elle se construit, entreprise par entreprise, région par région ».
La souveraineté économique ne se décrète pas : elle se construit, entreprise par entreprise, région par région ».
