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Didier Acouetey itinéraire d’un chasseur de têtes

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Didier Acouetey est le CEO d’AfricSearch, cabinet de recrutement leader en Afrique francophone. Forbes Afrique revient sur le parcours de ce Togolais et sur sa véritable success-story dans un secteur dominé par les grands groupes occidentaux.

C’est dans les bureaux d’AfricSearch Côte d’Ivoire à Abidjan que s’est déroulé l’entretien. Didier Acouetey, costume sombre, chemise blanche au col ouvert et lunettes à monture marron, paraît plus jeune que son âge. À 50 ans, il a tout l’air d’un quadra avec des yeux pétillants que sa passion et sa foi en l’Afrique semblent illuminer. Pourtant, rien de cette flamme ne paraît entamer sa lucidité et son sens critique. Ce jour-là, il est loquace, ne recule devant aucune question, puise dans les mille et un souvenirs du passé pour raconter son parcours et l’histoire de la success-story qu’est devenue AfricSearch, un cabinet de chasseur de têtes, leader du recrutement en Afrique francophone.

L’aventure a démarré en 1996 lorsque, à 27 ans, Didier Acouetey, jeune et ambitieux cadre africain à Paris, décide d’abandonner le confort d’une carrière dans le marketing et l’événementiel pour se lancer dans un projet entrepreneurial. Après des études de droit et de commerce à l’université de Paris 2 Panthéon-Assas et de marketing industriel au CNAM, le jeune Togolais exerce trois ans dans la filiale d’une compagnie américaine, Pretesting Europe, avant d’être engagé par le groupe CEP, éditeur du magazine L’Expansion et numéro un français de la presse professionnelle. Il y travaille au département des salons professionnels. «Une grosse machine, se souvient-il. Nous organisions une cinquantaine de salons par an.» Il y acquiert l’expérience et l’expertise de l’organisation d’événements qui lui seront précieux plus tard dans son parcours de businessman. Il complète son cursus en 2001 en passant un Executive MBA dans le but d’affûter son profil d’homme d’affaires.

UN PARI AUDACIEUX

Avant de se lancer dans le projet AfricSearch, Didier Acouetey est embarqué par un ami dans la création d’une entreprise d’emballage industriel. Comme un tour de chauffe avant le marathon du business. «Avec cet ami, nous avons créé une entreprise qui faisait tout ce qui touche à l’emballage pour les fruits et légumes, mais aussi à l’emballage promotionnel d’entreprise, raconte-t-il. C’était une expérience intéressante. Mais que j’ai vite abandonnée, car l’entreprise n’a pas décollé. Et tout de suite après je me suis lancé dans AfricSearch.»

AfricSearch est pour l’époque un pari osé. Celui de lancer en France une agence de recrutement de compétences africaines pour les grands groupes – les multinationales françaises notamment – opérant en Afrique. D’autant plus risqué que c’est une période marquée par un afropessimisme caractéristique des années 1990. Personne ne croyait à l’Afrique, encore moins aux Africains, qui eux-mêmes étaient afrosceptiques. C’était le continent des coups d’État, des guerres civiles, des pandémies, de la corruption qui faisait la une des médias internationaux. «On nous demandait avec quelles compétences nous comptions développer l’Afrique, se rappelle Didier Acouetey. “Il n’y en a pas”, nous disait-on. Face à ce pessimisme ambiant, nous voulions remettre le capital humain au cœur du développement. Cela faisait sourire. Mais notre conviction était que si nous-mêmes faisions partie des compétences, cela voulait dire que ces compétences existaient forcément. Nous avons lancé AfricSearch avec la certitude que nous pourrions trouver ces talents dans le réseau que nous avions développé en France et en Europe à travers nos associations. Parce que nous réunissions chaque année des milliers de jeunes Africains qui venaient suivre nos conférences : des étudiants en sciences politiques, des diplômés de Polytechnique, de grandes écoles de Paris, de Londres, de Bruxelles. Nous étions convaincus qu’il y avait une vraie intelligence africaine dans la diaspora et nous voulions la mettre au service du continent.»

Si AfricSearch démarre avec des convictions fortes et une vision claire, dans les faits, les débuts seront difficiles et pour tout dire, les premiers pas sont un quasiéchec. Didier Acouetey a pourtant pris la précaution de s’engager avec des partenaires. Ce sont non seulement des amis et camarades du mouvement associatif, mais surtout des personnes avec qui il partage les mêmes analyses sur les compétences africaines et des certitudes communes sur l’avenir de l’Afrique. Certains d’entre eux étaient avec lui dans l’aventure de l’association baptisée «Renaissance africaine». «Renaissance africaine a été pour moi la plus grande des écoles, soutient Didier Acouetey. Parce que nous avions de longues activités d’échange et de réflexion sur l’avenir de l’Afrique. Nous organisions de grandes conférences qui réunissaient des centaines de jeunes Africains. Nous éditions un journal diffusé tous les trois mois dans les universités et sur les campus. Nous avons rêvé d’une Afrique et nous courrons toujours après cette Afrique. Une Afrique qui soit développée par les Africains, avec des principes de bonne gouvernance, d’éducation, avec des valeurs. Une Afrique qui mette la jeunesse au cœur du développement avec un vrai secteur privé, une culture africaine qui imprègne nos institutions dans la façon de gouverner. Et donc AfricSearch n’est pas né par hasard, il est né du militantisme associatif qui nous a fait rêver d’Afrique. Le dénominateur commun de ces initiatives, c’était le capital humain, parce que nous nous disions que tant que nous ne miserions pas sur les talents africains, sur l’éducation, sur les compétences africaines, toutes ces idées seraient vaines.»

LE CHOC DU TERRAIN

AfricSearch a fêté ses 20 ans en 2016 et poursuit depuis son développement. Le cabinet ne manque aucun événement majeur du secteur, à l’image du SME & Financing Africa Forum.

Mais la réalité du business est avant tout celle du terrain. Et AfricSearch va buter sur le choc de cette réalité. Lorsque Didier Acouetey lance le cabinet en 1996, ils sont cinq associés qui viennent du vivier de Renaissance africaine. Ils mettent 250000 francs français de l’époque sur la table. «Nous étions pleins d’ambition et d’enthousiasme», se souvient-il. Mais les choses ne se passent pas comme prévu. «En 1996, nous n’avons eu que deux missions, et en 1997, nous en avons difficilement obtenu quatre. Il s’agissait de recrutements pour des entreprises. Celles-ci nous passaient des commandes pour des recrutements en ressources humaines pour l’Afrique, parce que ce que nous leur vendions, c’est que nous pouvions recruter les meilleurs talents pour leurs opérations sur le continent.»

C’est la période où on commence à parler d’africanisation des cadres. AfricSearch s’était positionné sur ce filon. L’idée était de…

Pour lire l’intégralité de cet article, rendez-vous pages 49-53 du numéro 60 Septembre 2019

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