Avec le rachat de la banque Atlas Mara Zambia, le banquier nigérian continue d’étendre les tentacules du réseau Access Bank, qui s’affirme comme un acteur majeur de la (re)configuration du secteur bancaire sur le continent. Boosté par les performances financières d’une holding en pleine croissance, il affiche des ambitions de plus en plus poussées en Afrique et au-delà.
Par Patrick Nelle I Portrait publié dans l’édition 73
Des Profits En Hausse Rapide
Access Holdings opère notamment dans la banque, les assurances, le courtage et la gestion de fonds de pension. Entre 2020 et 2021, sa filiale Access Bank a vu ses actifs bondir de 20,9 milliards de dollars (19 milliards d’euros) à 28,2 milliards (26 milliards d’euros environ), confirmant son statut de première banque du Nigéria en termes d’actifs. Un statut conforté par des profits en hausse rapide, passés de 255,1 millions de dollars en 2020 (un peu plus de 230 millions d’euros) à 312 millions en 2022 (environ 280 millions d’euros). Outre son marché domestique, le groupe est présent dans une douzaine de pays africains, dont l’Afrique du Sud, le Ghana, le Congo, la Zambie, la Guinée, le Mozambique et le Botswana. Il dispose aussi de filiales au Royaume-Uni et aux Émirats arabes unis, ainsi que des bureaux de représentation en Chine, en Inde et au Liban.
En mars 2023, la Banque centrale de Zambie a approuvé la fusion entre Atlas Mara Zambia et la filiale locale d’Access Bank. Une acquisition de plus pour le groupe financier nigérian déjà présent dans une douzaine de pays d’Afrique subsaharienne et qui, depuis plusieurs années, multiplie les opérations à l’extérieur du Nigéria. Son directeur général, Herbert Wigwe, affiche une ambition claire pour la suite : faire d’Access Bank le premier groupe bancaire d’Afrique, tout en élargissant sa base de revenus grâce à de nouvelles implantations d’ici cinq ans. Celles-ci concerneraient les États-Unis, la France, Hong Kong et Malte, ainsi que la Namibie, l’Angola, l’Éthiopie, l’Égypte… Cette stratégie devrait lui permettre, comme l’indique un communiqué du groupe, de « diversifier ses revenus en dehors des environnements opérationnels volatils, d’orchestrer ses opérations en tant que passerelle entre plusieurs continents dans le domaine des paiements, et de mieux gérer ses risques et son exposition aux devises faibles ». Ancien élève du programme de gestion exécutive de la Harvard Business School, Herbert Wigwe, 57 a ns cette année, est l’artisan des bouleversements qui en deux décennies ont vu une modeste banque nigériane se transformer en une holding aux ambitions gigantesques, cotée à la bourse du Nigéria depuis 2022. L’homme, qui a passé son enfance dans ce pays (sa mère y était infirmière et son père, pasteur, dirigeant du groupe audiovisuel public NTA), s’est d’abord orienté vers un diplôme en comptabilité, obtenu à l ’Université du Nigéria. Suivront une maîtrise en banque et finance à l’University College of North Wales (aujourd’hui Bangor), puis une maîtrise en économie financière à l’Université de Londres.
Le Rachat De Diamond Bank
Sa carrière débute au sein du cabinet international d’experts-comptables Coopers & Lybrand Associates (à Lagos). Il rejoint ensuite la Guaranty Trust Bank (GT Bank), où durant douze ans il gère des portefeuilles de grandes entreprises, d’institutions financières et de multinationales. Il y côtoie Aigboje Aig-Imoukhuede et une très forte amitié se tisse entre les deux hommes. En 2002, le duo décide de racheter une petite banque en difficulté, Access Bank. Wigwe en devient directeur général adjoint et engage une modernisation tous azimuts de l’établissement. Suivront vingt années au cours desquelles Access Bank assoit sa crédibilité sur le continent. Entre- temps, Herbert Wigwe a succédé en 2014 à son ami Aigboje Aig-Imoukhuede au poste de directeur général. Six ans plus tard, le financier est élu banquier africain de l’année (il en sera de même en 2021) après s’être distingué par son sens de l’innovation. Depuis le rachat en 2018 de Diamond Bank, il est à la tête de la plus grande banque du Nigéria en termes de dépôts et d’actifs. Tout en se montrant maître dans l’art de la croissance externe (fusions-acquisitions, absorptions…) Wigwe se démarque par le lancement d’une obligation verte, l’instauration des Principes bancaires nigérians pour la durabilité, ou la création d’un régime de soutien à la santé maternelle.
Une Fortune Colossale
Aujourd’hui, il détient 4,26 % d’Access Holdings, ce qui situe sa fortune personnelle à 37,3 millions de dollars (environ 34 millions d’euros). Féru d’art et collectionneur, le financier, père de quatre enfants, a créé en 2016 la fondation HOW (Herbert Onyewumbu Wigwe Foundation), qui mène des actions de lutte contre la malaria et le cancer, ainsi que pour l’autonomisation des jeunes par le leadership. Ce dernier concept est cher à Wigwe, qui a initié en 2013 une série de conférences mondiales sur « Le leadership durable », où se sont pressés plusieurs chefs d’État tels Nicolas Sarkozy ou George W. Bush. De quoi assurer la stature du banquier visionnaire, qui souhaite faire d’Access Bank « la banque africaine la plus respectée au monde ».