Passionnée de mathématiques, la Sénégalaise Diarra Bousso a fait le pari de créer une ligne de vêtements dont les motifs ont été conçus à l’aide d’algorithmes, DIARRABLU. Une idée audacieuse qui paie aujourd’hui.
Par Patrick Ndungidi
Lancée en 2013, DIARRABLU produit des vêtements au Sénégal dans une petite usine que Diarra Bousso a construite de toutes pièces. Elle travaille avec les communautés artisanales locales et leur offre une formation solide et des opportunités d’emploi à long terme. Les produits de DIARRABLU, explique sa fondatrice, sont fabriqués sur commande pour minimiser les déchets et 95 % des vêtements produits par l’entreprise sont vendus sur les marchés américains, via la plateforme diarrablu.com et par le biais de partenariats avec de grands détaillants comme Nordstrom, Stitchfix et Shopbop.
Diarra Bousso, qui se décrit comme « une entrepreneuse en série, une mathématicienne créative et une artiste multidisciplinaire », se concentre sur la fusion réfléchie des mondes des mathématiques et des arts pour une approche multidisciplinaire de l’innovation dans la conception et l’apprentissage. De fait, les produits de DIARRABLU sont le fruit d’une fusion entre tradition et technologie, artisanat et algorithmes. Le processus de conception de la marque est le résultat de mathématiques créatives innovantes grâce à l’utilisation de graphes algébriques et de transformations géométriques pour créer des imprimés emblématiques.
Née à Dakar, au Sénégal, Diarra Bousso a grandi en Norvège, avant de déménager aux États-Unis, où elle a commencé sa carrière à Wall Street. Par la suite, elle a démissionné et lancé son entreprise, afin de suivre sa passion pour l’art, les mathématiques et le design, motivée principalement par les encouragements de personnes qui aimaient ses créations. « Nous avons reçu un soutien formidable de la part d’amis qui ont acheté nos produits et j’ai finalement acquis beaucoup de confiance pour constituer une équipe et investir plus de temps et de ressources dans la start-up. C’est ainsi que DIARRABLU est née », explique l’entrepreneuse. À partir de ces modestes débuts, Diarra Bousso a alors commencé à partager ses peintures sur Instagram. Une utilisation des réseaux sociaux qui lui a « apporté beaucoup de soutien », se rappelle la jeune femme, lui donnant notamment la confirmation du marché nécessaire pour créer un studio à la maison avec l’aide de ses parents et de ses frères et sœurs, à la fois sur la stratégie, la production, les ventes et la gestion des relations publiques.
Une entreprise en pleine expansion
Titulaire d’une Maîtrise en enseignement des mathématiques de l’université de Stanford, Diarra Bousso se rappelle avoir toujours été créative. « J’ai commencé le ballet et la peinture au Sénégal à l’âge de cinq ans et j’ai ensuite exploré de nombreux autres domaines tels que le tricot, le crochet, la couture et la poterie. J’ai toujours été curieuse d’explorer diverses formes d’art depuis mes premières années. J’ai aussi beaucoup aimé les mathématiques et les sciences, mais j’ai dû choisir entre les mathématiques et l’art et à la fin, je me suis concentré sur les mathématiques lorsque j’ai déménagé en Norvège au lycée, mais plus tard, j’ai également voulu suivre ma passion pour l’art », précise la patronne de DIARRABLU.
Aujourd’hui, Diarra Bousso a agrandi son usine de production au Sénégal, triplé ses effectifs et vendu à plus de 10 000 clients dans 40 pays. Avec son équipe de plus de 50 personnes, Diarra Bousso a conclu des partenariats de plusieurs millions de dollars avec divers détaillants américains et développe actuellement une plate-forme technologique unique pour faire évoluer ses innovations avec des mathématiques créatives. Diarra Bousso a présenté ses collections lors des semaines de la mode de New York et de Paris et ses créations ont été publiées dans Vogue, Glamour, le New York Times et le magazine Elle, entre autres. La jeune entrepreneuse a par ailleurs été invitée à prendre la parole dans des panels à Harvard, Stanford et au MIT, notamment sur des sujets tels que les voyages de luxe, la conception culturellement adaptée et l’innovation durable.
Nommée parmi les dix meilleurs entrepreneurs d’Afrique en 2020
Une reconnaissance publique qui explique sans doute qu’elle ait été sélectionnée parmi les 10 meilleurs entrepreneurs du concours Africa’s Business Heroes (ABH), l’un des programmes caritatifs de la Fondation Jack Ma, qui recherche et soutient des entrepreneurs Africains opérant dans tous les secteurs, dont les entreprises inspirent le changement et génèrent croissance au sein de leurs communautés locales. Sélectionnée parmi plus de 22 000 entrepreneurs de toute l’Afrique, Diarra Bousso a pu ainsi décrocher une part de la subvention de 1,5 million de dollars allouée aux lauréats du concours ABH. De quoi changer d’échelle et nourrir de nouvelles ambitions. « Le concours nous a offert une formation, un réseautage et un soutien financier inestimables qui nous ont tous donné un grand coup de pouce pour faire grandir nos rêves et nos innovations », confirme Diarra Bousso. Prochain objectif : devenir un exemple mondial dans le monde de la mode, en jouant sur l’innovation, l’éthique et la durabilité. Le tout ancré dans l’artisanat traditionnel africain et propulsé par la technologie et les algorithmes.
Crédit-photo : Diarrablu