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Thérèse Sekamana : « Pour lutter contre les changements climatiques, il faudra plus de projets d’énergie verte »

PDG et fondatrice de la société LED Solutions & Green Energy Rwanda, spécialisée dans l’énergie verte, Thérèse Sekamana a démarré son activité en 2011. Après des années à fournir le secteur public et privé avec cette technologie d’éclairage qui était nouvelle pour le pays, elle a fait passer son entreprise au niveau supérieur en investissant dans les énergies renouvelables. Green Energy Rwanda possède aujourd’hui deux PPA (Power Purchase Agrement ou contrat d’achat d’électricité) de vingt-cinq ans avec le gouvernement rwandais pour deux centrales hydroélectriques.

Propos recueillis par Dounia Ben Mohamed

Forbes Afrique : Quelle réponse une entreprise comme la vôtre apporte-t-elle au défi énergétique en Afrique ?

Thérèse Sekamana : Une des cartes clés est d’avoir un gouvernement qui porte un intérêt réel à l’amélioration du niveau de vie de la population via l’électrification. Il faut aussi que ce gouvernement propose des solutions attrayantes pour ceux qui souhaiteraient investir dans ce secteur. Avec le PPA, on est assuré qu’une fois l’investissement finalisé, la production sera rachetée à 100 %, sur une durée de vingt-cinq ans. Du côté de l’investisseur, il est également important de toujours garder foi dans le développement et de rester flexible, même quand cela semble impossible. D’une manière ou d’une autre, le retour sur investissement arrivera.

Comment peut-on innover en matière de financement ?

T. S. : Les pays les plus émetteurs de CO2 de la planète sont les États industrialisés qui contribuent à la constitution des fonds verts. Les plus touchés par cette pollution, cause majeure du changement climatique, sont les pays en voie de développement, notamment ceux d’Afrique, qui devraient logiquement avoir accès à ces fonds sans devoir passer par des processus lourds et compliqués.

« Les pays les plus touchés par la pollution que génèrent les États industrialisés sont les pays en voie de développement, notamment ceux d’Afrique, qui devraient logiquement avoir accès aux fonds verts sans devoir passer par des processus lourds et compliqués »

Le continent subit déjà davantage de phases de chaleur extrême, de sécheresse et de précipitations que par le passé ; c’est une réalité indéniable. Pour limiter ces catastrophes, il faudra lutter contre les changements climatiques en développant entre autres plus de projets d’énergie verte. La plupart des projets liés aux énergies renouvelables sont partiellement financés par les fonds verts. Le processus pour y accéder est long et lourd, ce qui décourage la plupart des investisseurs. Il faut dire que certains de ces projets ne sont pas « bancables » et ont besoin de subventions ; subventions qui proviennent des fonds verts. 

Ces mécanismes de financement sont-ils adaptés aux réalités africaines ? 

T. S. : Aujourd’hui, il reste très compliqué de bénéficier de la finance verte, même si le modus operandi s’est globalement amélioré. L’investissement est conséquent, il faut comprendre le fonctionnement des agences ou institutions internationales qui gèrent ces fonds ainsi que les procédures, qui s’effectuent généralement en langue anglaise, ce qui n’est pas forcément évident pour les investisseurs francophones. L’instruction des dossiers est longue, les études d’impact environnemental coûtent cher… Le niveau d’exigence des fonds verts reste très élevé. 

Pour ce qui concerne nos pays africains, la plupart des projets d’énergie renouvelable sont financés par les banques de développement locales ou régionales. Ces banques font toutes partie du Club IDFC (International Development Finance Club), qui rassemble 26structures dans le monde, en majorité nationales ou régionales. Sur le continent, on peut citer la BOAD (Banque ouest-africaine de développement) en Afrique de l’Ouest, la DBSA en Afrique australe (Development Bank of Southern Africa) et la TDB en Afrique de l’Est (Trade & Development Bank).  Cette coalition regroupe 500 banques publiques qui représentent 10 % de l’investissement mondial annuel. Celles-ci ont un rôle essentiel à jouer dans la transition énergétique de leur pays et donc dans le financement des projets verts.

Les fonds verts qui existent aujourd’hui devraient être opérés au sein de ces structures, qui n’ont pas qu’une vocation commerciale, mais peuvent aussi contribuer à financer des projets de développement. Ceci permettrait de se délester des pesanteurs administratives et simplifierait les démarches des investisseurs.  Les agences locales en charge des fonds verts et les banques nationales de développement étant deux institutions complémentaires qui visent les mêmes objectifs, elles gagneraient à fusionner pour atteindre ces objectifs plus rapidement et facilement.

Crédit-photo : Forbes Afrique

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