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Repenser l’approvisionnement en matériaux de construction

Bâtiment en construction ©its kiran

Souvent onéreux et pas toujours adaptés, les matériaux de construction importés sont plus problématiques qu’ils n’apportent de solutions. Une donne qui pourrait en partie être changée avec le développement de filières locales de production.   

Par Albert Menelik Tjamag, Designer-Promoteur immobilier, COO de Glocal-Atom (Cameroun) 

La question de l’approvisionnement en matière de construction est primordiale pour qui veut construire son logement. La question a d’autant plus d’intérêt en Afrique subsaharienne où l’auto-construction est la règle. Mettons de côté les projets structurés ou initiés par des privés qui en ont les moyens. Notre propos est centré ici sur la classe moyenne qui cherche à construire son logement sans forcément avoir les moyens d’acheter la meilleure qualité ou de supporter le coût des matériaux importés. On tombe de fait dans un marché parallèle qui propose des produits plus abordables certes mais aussi moins qualitatifs. Cela contraint le maître d’œuvre à rester dans une logique provisoire. Il arrivera sans doute à élever son bâtiment, mais avec des matériaux qui auront une durée de vie limitée et qui seront forcément sujets à de futurs problèmes. L’autre solution qui n’en est pas une sera de réduire certaines quantités au risque d’aboutir à des constructions qui ne sont plus aux normes. Ce qui explique peut-être l’affaissement de certains immeubles, un peu partout sur le continent.

Une compétitivité en question

Il est peut-être utile de repenser nos modes de fonctionnement en matière de construction, car l’utilisation systématique de matériaux importés qui ne sont pas toujours adaptés à nos climats nous désavantage et alourdit la facture énergétique de la planète. Ne serait-ce que pour le transport, la construction d’une maison se heurte dès lors à un prix plafond en deçà duquel on ne peut descendre. Ces prix élevés handicapent les populations locales qui n’ont pas la capacité financière d’acheter et cela ne permet pas de créer un marché viable en rapport avec les nombreuses populations qui souhaitent construire.

La solution locale

En 2016, le gouvernement camerounais avait décidé de suspendre jusqu’à nouvel avis l’importation de fer à béton dans la construction pour permettre aux acteurs locaux de prendre plus de place. Mais les nombreuses autorisations spéciales d’importation accordées par ce même gouvernement ont vidé cette mesure de sa substance. Dans le même temps, Prometal 4, une unité de transformation de fer annoncée comme la plus moderne en Afrique subsaharienne, fruit d’un investissement de 40 milliards de francs CFA(61 millions d’euros) va être mise en service à Douala. La fabrication locale de ces produits permettra au Cameroun de réduire de 50% le déficit de la balance commerciale sur les matériaux de construction à base de fer. Les aciéries locales, qui craignent les autorisations spéciales d’importation souhaitent que le gouvernement instaure un quota de matériaux locaux en fer, à utiliser par les entreprises réalisant des projets d’infrastructures et du BTP financés par l’État du Cameroun. C’est clairement la voie à suivre pour baisser les coûts de la construction et aider à l’industrialisation de nos pays africains. Le même exemple de production locale est suivi pour ce qui concerne la production de ciment et la fabrication de briques aux normes internationales.

Des biens résidentiels abordables

De nouveaux opérateurs locaux cherchent par ailleurs à percer sur leur marché national comme la marque de peinture Sippec en Côte d’Ivoire, qui a inauguré en 2019 une usine de peinture d’une capacité de 40 000 tonnes à Abidjan et ce dans l’optique de concurrencer le pionnier du secteur depuis 40 ans, le groupe Hyjazi. Une concurrence saine qui, nous l’espérons, tirera les prix vers le bas. Il faudrait multiplier ces exemples et produire davantage de matériaux locaux pour entraîner une baisse significative des prix de la construction. Il faut trouver des matières premières de qualité dans des prix accessibles pour garantir une marge intéressante aux entreprises de BTP et permettre un prix modéré à la revente au mètre carré. Dans cette optique, le cimentier Lafarge a tenté d’innover avec des briques mixant ciment (importé) et terre (locale). Le coût du produit n’a pas été jugé suffisamment attractif par rapport aux briques de ciment. Proposer des biens résidentiels peu chers paraît difficile quand les matériaux sont importés. C’est pourtant un marché promis à un bel avenir au regard de la poussée démographique africaine. 

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