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Christian Din Dika : “Emrald Securities Services a Pour Ambition De Créer Une Banque”

Financier respecté au sein des marchés financiers de l’Afrique Centrale et de l’Ouest, l’entrepreneur camerounais Christian Din Dika a fondé en 2020 et dirige Emrald Securities Services, groupe d’établissements financiers et d’investissement exerçant sur les marchés des capitaux. Entretien avec cet ambitieux chef d’entreprise qui vise les hauts sommets de la finance.


Vous êtes aujourd’hui un expert reconnu notamment dans la structuration d’emprunts obligataires pour les États de la communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC). Quel a été votre parcours professionnel ?

Christian Din Dika : Titulaire d’un master en gestion des ressources humaines et d’un autre master en techniques comptables et financières de l’Université catholique du Cameroun, j’ai également suivi une formation pour cadres et dirigeants à Sciences Po Paris. Après avoir travaillé au Douala Stock Exchange, la Bourse de Douala, pendant au moins dix ans, comme chef de département des opérations de Bourse, j’ai été recruté, en 2016, par le groupe Attijariwafa Bank dans leur département Banque d’affaires [Attijari Securities Central Africa, filiale du groupe Attijariwafa bank dédiée aux activités de banque d’Investissement en Afrique Centrale, NDLR]. J’y ai travaillé pendant presque quatre ans, comme directeur Securities, avant d’être promu directeur général adjoint. Le poste de directeur général m’a ensuite été proposé, mais j’ai décliné l’offre pour relever d’autres challenges. Après avoir quitté Attijariwafa Bank, je me suis mis à mon compte, d’abord comme apporteur d’affaires, avant de créer mon entreprise, Emerald Securities Services, en juillet 2020. Mais, auparavant, j’avais créé la Holding S Capital, société essentiellement de participation, mais qui propose aussi du conseil pour les États de la zone CEMAC.

Par la suite, j’ai créé la société d’intermédiation financière Emerald Securities Services Bourse (ESSB), active dans l’ingénierie financière, le conseil en levée des fonds, la fusion-acquisition, ainsi que le conseil en finances d’entreprise et en finances des marchés. ESSB est active dans l’intermédiation, c’est-à-dire qu’elle accompagne des entreprises et des États à lever des fonds dans la zone CEMAC et même à l’étranger. La conservation des titres fait également partie de nos activités annexes. ESS Bourse est une société agréée par la commission de surveillance du marché financier de l’Afrique Centrale (COSUMAF).

Pour sa part, la deuxième filiale du groupe, Emrald Securities Services Asset Management (ESS AM), est spécialisée dans la gestion d’actifs.


Qu’est-ce qui fait la particularité de l’offre d’ESS Bourse ?

C. D. D. : Une quarantaine de sociétés de bourses et de gestion d’actifs agréés sont actuellement opérationnelles et en concurrence. Néanmoins, le marché n’est pas à l’image du nombre important de sociétés d’intermédiation financière et de gestion d’actifs actuellement en activité. La particularité d’ESS Bourse réside dans son expertise. Il s’agit en effet d’une jeune entreprise qui bénéficie de la longue expérience de ses promoteurs et de ses cadres. Personnellement, j’ai 20 ans d’expérience dans la finance et mes collaborateurs ont à peu près le même nombre d’années d’expérience, acquises principalement dans divers groupes bancaires et, pour certains, dans des compagnies d’assurances. En plus de l’expertise, la qualité de service dont nous faisons bénéficier nos clients, ainsi que notre proximité avec eux constituent également nos atouts.

Christian DIN DIKA, DG de Emerald Securities Services ©

« ESS Bourse est une jeune entreprise qui bénéficie de la longue expérience de ses promoteurs et de ses cadres ».


Quelle est l’envergure de votre groupe aujourd’hui ?

C. D. D. : ESS Bourse dispose actuellement de bureaux au Cameroun et au Gabon et compte une vingtaine de collaborateurs dans les deux pays. Au cours des 4 dernières années, notre chiffre d’affaires cumulé est de 20 milliards de francs CFA (30,5 millions d’euros). Nous gérons également un portefeuille de 350 milliards de francs CFA (environ 533 millions d’euros) pour nos clients. D’ici la fin de cette année, ce chiffre atteindra 450 milliards de francs CFA (685 millions d’euros).


Quelles sont les opérations d’envergure que vous avez déjà réalisées ?

C. D. D. : Nous avons effectué des emprunts obligataires pour des États. En 2021, notre premier emprunt obligataire de 100 milliards de francs CFA (152 millions d’euros) a été réalisé pour le compte du Congo-Brazzaville et nous avons levé 113 milliards. La même année, ESS Bourse a levé 150 milliards de francs CFA (228 millions d’euros) pour le Gabon. En 2022, nous avons encore réalisé un autre emprunt obligataire de 150 milliards de francs CFA pour le compte du Gabon. En 2023, ESS Bourse a effectué un placement privé pour le Gabon d’à peu près 100 milliards de francs CFA et, la même année, a réalisé un autre emprunt obligataire de 150 milliards de francs CFA pour le Gabon. Toujours en 2023, nous avons été co-arrangeur pour l’emprunt obligataire de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC), qui souhaitait également lever 150 milliards de francs CFA. Nous y avons participé avec une collecte de 43 milliards de francs CFA (65 millions d’euros). Aujourd’hui, nous sommes en train de lever pour le Gabon un emprunt obligataire de 150 milliards de francs CFA que nous sommes censés clôturer à la fin du mois de mai.

« Nous avons effectué des emprunts obligataires pour des États et nous gérons les portefeuilles de titres pour des entreprises privées et des banques ».


En dehors du Congo et du Gabon, qui sont vos autres grands clients ?

C. D. D. : Nous gérons les portefeuilles de titres pour des entreprises privées et des banques. Nous accompagnons également ces entreprises privées dans le conseil en finances d’entreprise, en évaluation d’entreprise et dans la cession d’actions à titre privé.


Votre champ d’action se limite-t-il uniquement à l’Afrique centrale ? 

C. D. D. : Notre agrément nous permet d’intervenir essentiellement sur les marchés financiers en Afrique centrale. Mais, dans le cadre d’une opération de financement ou de rachat d’entreprise, nous pouvons démarcher des investisseurs étrangers pour les amener à opérer au sein du marché financier de l’Afrique centrale. Nos agréments sont sous-régionaux et nous ne pouvons pas effectuer de placements dans d’autres zones, comme l’UEMOA ou en Europe. 


Avez-vous néanmoins des partenariats avec des entreprises situées sur d’autres marchés sous-régionaux en Afrique ?

C. D. D. : Nous avons établi des joint-ventures avec des sociétés de Bourse en Afrique de l’Ouest. En effet, beaucoup de groupes installés au Cameroun sont également présents en Afrique de l’Ouest. Ainsi, des clients évoluant dans cette sous-région peuvent manifester la volonté d’investir au Cameroun et vice-versa. Nous sommes donc obligés de contacter nos confrères de l’Afrique de l’Ouest ou eux de nous contacter, afin de prendre en charge l’opération, car nous ne sommes pas agréés pour effectuer des opérations en dehors de nos marchés respectifs.


Comment se présente le marché financier de l’Afrique centrale aujourd’hui ?

C. D. D. : Le marché, qui est jeune par rapport à d’autres en Afrique, a véritablement vu le jour en 2003, d’abord avec un marché national, au Cameroun, et un marché sous-régional basé à Libreville, au Gabon. Cette double présence a entraîné une scission du marché sous-régional. Néanmoins, les réformes opérées, ainsi que la volonté politique des chefs d’État de la CEMAC, ont conduit à l’unification des deux marchés. Cette fusion a été effective en 2018. Aujourd’hui, ce marché embryonnaire dispose de six valeurs dans son compartiment des actions, tandis que le compartiment obligataire compte une dizaine de lignes qui sont essentiellement des emprunts obligataires des États.

Par ailleurs, le nombre d’opérations effectuées chaque année par rapport au nombre de sociétés d’intermédiation financière ne suffit pas pour permettre à toutes les sociétés de tirer parti des avantages du marché. Depuis l’année dernière, deux ou trois opérations sont effectuées en moyenne par année. Les années précédentes, seulement une ou presque deux opérations étaient réalisées par année. Mais, aujourd’hui, plusieurs Etats peuvent manifester la volonté de lever des fonds au même moment. Certains y arrivent et d’autres pas. C’est ainsi que seulement deux ou trois opérations sont enregistrées en moyenne. Mais ces opérations ne sont pas réalisées par une seule société de bourse. Celles-ci se constituent en consortium, afin de garantir le succès des opérations, compte tenu du volume important des fonds sollicités. Néanmoins, toutes les sociétés de bourse ne sont pas logées à la même enseigne. La concurrence est très rude.


Quelles sont les perspectives de croissance de ce marché et comment ESS Bourse compte-t-elle en tirer profit ?     

C. D. D. : Les perspectives de croissance du marché sont bonnes. Chaque année, sa profondeur est en croissance et se trouve être beaucoup plus sollicitée. Mais, pour qu’un marché financier soit pérenne, le marché secondaire doit également être structuré et animé. Un marché financier ne se limite pas seulement au marché du neuf, c’est-à-dire à une levée de fonds sur le marché primaire. Les investisseurs en besoin de liquidité doivent être en mesure de céder leurs actifs ou valeurs mobilières sur le marché à tout moment. La Bourse est donc un cadre propice à ces échanges. En outre, le compartiment actions doit être développé, afin de permettre une diversification importante des produits ou d’instruments innovants à proposer aux agents à capacité de financement et même aux particuliers qui veulent épargner et avoir un meilleur rendement. Ce compartiment garantit la pérennité d’une Bourse. Aujourd’hui, les chefs d’État ont consenti à choisir ou à dresser, chacun en ce qui le concerne, une liste de sociétés qu’ils souhaiteraient voir introduites en Bourse. Lorsque la volonté des chefs d’État va se matérialiser, la profondeur du marché sera encore un peu plus importante, avec de meilleures perspectives.

« Dans le cadre d’une opération de financement ou de rachat d’entreprise, nous pouvons démarcher des investisseurs étrangers pour qu’ils viennent opérer au sein du marché financier de l’Afrique centrale ».


Quels sont vos projets pour le groupe ? 

C. D. D. : Renforcer notre positionnement et solidifier nos acquis, afin d’être plus compétitifs et plus efficaces dans l’accompagnement de nos clients, en proposant de vastes gammes de produits diversifiés. Concrètement, aujourd’hui, Emrald Securities Services a pour ambition de se lancer dans la filière bancaire, en commençant par la microfinance. Après la microfinance, le groupe va passer à l’étape de la création d’une banque.

Par ailleurs, une digitalisation complète en faveur de nos clients figure également dans nos projets. Actuellement, la digitalisation ne permet pas la présence d’applications pouvant permettre d’effectuer, par exemple, des opérations de trading sur le marché, en débitant et en créditant nos comptes, parce que les logiciels utilisés ne sont pas compatibles. La digitalisation est le service optimum du futur. Elle permettra au client d’effectuer ses opérations chez lui, via une application. 



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