Le média de ceux qui construisent l'Afrique d'aujourd'hui et de demain

Claude Grunitzky présente le podcast « Limitless Africa » : quand la créativité et le digital deviennent les porte-voix d’une génération au discours affirmé.

La question d’un modèle financier viable s’avère complexe pour ce type de média ancré dans le digital. Comment le projet s’est-il structuré ?

Contrairement à mon ancien média, TRACE, que j’avais lancé autour d’un modèle de revenus publicitaires et d’abonnements, j’ai eu beaucoup de mal à trouver une capacité bénéficiaire pour TRUE AFRICA. Les annonceurs préfèrent aujourd’hui les grands réseaux sociaux aux médias indépendants, et mon équipe s’est vite rendue à l’évidence qu’il fallait qu’on trouve un nouveau modèle économique pour assurer la pérennité de TRUE AFRICA. Aujourd’hui, nous opérons sur la base de partenariats, avec des géants du numérique comme Google qui nous financent, mais aussi avec des associations africaines comme Africa No Filter, une structure domiciliée en Afrique du Sud et qui cherche à promouvoir le nouveau journalisme africain. J’ai aussi des liens très forts avec le gouvernement américain, qui a misé sur moi il y a une dizaine d’années. C’est un peu paradoxal de dire ça en tant que Togolais, mais ce sont les Américains qui sont mes premiers soutiens financiers, et qui continuent de croire en mes projets média pour l’Afrique et sa jeunesse. J’ai eu la chance de signer, l’année dernière, un important partenariat avec le Département d’État américain, qui finance notre podcast LIMITLESS AFRICA. Je souligne que ce podcast hebdomadaire est diffusé tous les lundis en français et en anglais, mais aussi en portugais et en kinyarwanda. Je suis fier de ce que notre équipe a réussi à créer avec ce podcast, qui me passionne totalement. En mettant l’accent sur les solutions africaines aux problèmes africains, je crois que nous arriverons, à terme, à faire bouger les lignes. Je suis intarissable sur notre podcast LIMITLESS AFRICA, puisque j’y vois mille et une possibilités d’échanges autour des sujets qui comptent pour les Africains.

Quel bilan faites-vous de ces 6 premiers mois du podcast LIMITLESS AFRICA ? Quels sont les retours du public, mais aussi de vos partenaires ?

Les retours du public—et de nos partenaires—sont globalement très positifs, même si la version anglophone est beaucoup plus populaire que les autres versions. J’ai été surpris par le différentiel, et par le fait que les versions en français, portugais et en kinyarwanda ne soient pas, en termes d’auditeurs, en croissance exponentielle comme la version anglophone. C’est pour cela que la diffusion de notre podcast sur les radios communautaires d’Afrique est si importante. Notre objectif est d’arriver à un total de 10 millions d’auditeurs cumulés pour la première saison, qui compte 30 épisodes. Chaque épisode dure 15 minutes, et j’invite vos lecteurs à découvrir LIMITLESS AFRICA sur www.TRUEAFRICA.co, ou sur Apple Podcasts ou Spotify.

Au cœur de votre démarche, il y a toujours eu cette volonté de donner voix à la nouvelle génération d’entrepreneurs et artistes Africains. Comment percevez-vous le rôle des industries créatives dans le développement économique du continent ?

Je suis persuadé que les industries culturelles et créatives vont beaucoup se développer en Afrique dans les 10 prochaines années. J’ai démarré ce combat, il y a un quart de siècle, pour que la créativité africaine soit reconnue dans le monde entier, mais j’avoue que j’ai été souvent déçu par le manque d’intérêt de certains capitaines d’industrie en Afrique. J’ai souvent proposé des projets culturels à des milliardaires africains, mais aucun d’entre eux n’a mordu à l’hameçon. Pourtant, la musique de Burna Boy et de Wizkid est désormais connue sur toutes les pistes de danse. De même, certains des nouveaux films africains —notamment ceux venant de Nollywood — mettent en avant les rythmes locaux des métropoles africaines tout en défiant les standards internationaux. Les imprimés du wax africain sont repris par les grands créateurs de mode européens, de Dior à Gucci, et partout en Afrique on voit de nouvelles modes bigarrées aux multiples racines. Je suis bien placé pour le savoir, puisque ma mère était couturière à Lomé, et que j’ai vu comment certains jeunes créateurs africains arrivent à se démarquer.

TRUE AFRICA sert aussi à partager des infos avec mes amis américains et européens qui cherchent à comprendre les nouvelles tendances issues de l’Afrique. Beaucoup de jeunes Africains sont décomplexés, et je trouve que leur créativité dénote du fait qu’ils sont plus confiants, qu’ils imaginent un avenir qui soit différent de celui qui était imposé à leurs parents. Cette nouvelle génération d’Africains m’inspire beaucoup, et avec le podcast LIMITLESS AFRICA nous voulons expliquer pourquoi cette génération est si différente de la mienne. Cette génération ose penser différemment. La jeunesse africaine à laquelle nous donnons la parole avec LIMITLESS AFRICA revendique le droit à la sensualité, au bonheur et à la liberté́. Internet a changé la donne, puisque le numérique et ses outils permettent la production d’images et de systèmes de pensée qui peuvent transformer le destin de tout un continent.

TRUE AFRICA, c’est également un projet éducatif. Que dire de la notion de transmission pour vous ?

J’ai énormément travaillé depuis que j’ai lancé mon premier média, il y a plus de 25 ans. J’ai eu la chance d’avoir beaucoup de succès assez jeune et aujourd’hui ce qui me motive, c’est la transmission. Le podcast LIMITLESS AFRICA participe à cet élan, mais je viens de lancer aussi TRUE AFRICA UNIVERSITY. C’est une plateforme panafricaine d’enseignement supérieur pour laquelle j’ai de très grandes ambitions. Je l’ai lancée l’année dernière avec le MIT, l’université où j’ai étudié à Boston, et nous sommes en train de nouer des partenariats tous azimuts, tout en affinant les axes de développement. 

Après un premier ballon d’essai en 2021, nous réfléchissons actuellement à de nouveaux cycles de 6 semaines sur les thèmes prioritaires pour l’Afrique, en particulier en matière de développement durable. Lors du premier cycle, qui portait sur les effets du changement climatique sur l’Afrique, nous avons fait intervenir des universitaires de renom, mais aussi des activistes et des entrepreneurs. Bref, nous ne cherchons que des gens qui sont dans l’action. Je veux aussi mettre en évidence le rôle que jouent les Africains de la diaspora dans le développement du continent africain. La démarche est la même que pour le podcast LIMITLESS AFRICA. La première étape est d’identifier ces thèmes, 100% focalisés sur l’Afrique de demain, afin de les introduire dans les cycles de formation pour nos étudiants. Pour l’instant, les thèmes qui nous intéressent sont l’énergie, l’eau, l’agriculture, la gouvernance, et les industries culturelles justement.

Le podcast LIMITLESS AFRICA nourrit notre la réflexion, et nous sommes à la recherche d’un maximum d’enseignants et d’intervenants liés au continent, où qu’ils vivent. Le podcast a aussi pour vocation d’aider TRUE AFRICA UNIVERSITY à devenir une machine à produire de telles sessions. Finalement, dans tous mes projets TRUE AFRICA, il y a pas mal d’économie d’échelle. L’essentiel est de trouver les bons formats, et les bons outils technologiques. Les talents africains sont là, et nous sommes en train de les dénicher. Une fois que nous aurons trouvé ces formats et ces outils, nous trouverons aussi les sources de financement. Certains détracteurs pensent que TRUE AFRICA est une utopie. Pour moi, c’est un Eldorado.

Crédit-photo : True Africa

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