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EGAAD : Une Locomotive Égyptienne en Faveur du Développement de l’Afrique

Réunissez les champions nationaux, leurs partenaires internationaux, les bailleurs de fonds et vous obtenez EGAAD (Egyptian African Arab Co. for Development). Consortium réunissant 34 entreprises et leurs partenaires, EGAAD a pour vocation de “construire l’Afrique par les Africains”.  Enjeux et explications avec son directeur général, Reda Boulos.

Propos recueillis par Dounia Ben Mohamed


Forbes Afrique : Présentez-nous le concept de votre institution, l’EGAAD ?

Reda Boulos : J’ai créé le consortium EGAAD en 2019, en m’inspirant du modèle japonais des Sogo Sosha, ces grandes sociétés de commerce liées aux grands groupes industriels et financiers japonais, les Keiretsu. À l’origine de ce modèle, des conglomérats ont été créés pour exporter l’expertise japonaise après la reconstruction qui a suivi le bombardement atomique d’Hiroshima, porté par des acteurs privés commandés par l’Etat. Quand la reconstruction a été faite, il a fallu occuper ces champions nationaux, qui ont émergé. En 2013/2014- juste après la révolution de 2011 et la prise de pouvoir par les militaires, conduits par Abdel Fattah Al-Sissi -, nous nous sommes retrouvés dans la même situation que le Japon. Il fallait reconstruire l’Egypte. Le leadership égyptien a eu la bonne idée d’inclure et de faire participer les entreprises égyptiennes dans ce travail de reconstruction, ce qui a permis l’émergence de grands groupes nationaux, à même d’entreprendre de larges projets à l’international.

Quand l’Egypte a pris la présidence de l’Union Africaine, en 2019, j’ai compris que nous suivions la même trajectoire que le Japon. Il fallait éviter que les grands groupes égyptiens se trouvent dans une situation d’arrêt. Nous avons alors lancé le consortium EGAAD, afin de réunir des entreprises dominantes sur le marché égyptien dans les différents secteurs clefs du développement avec une volonté commune : celle de s’exporter davantage en Afrique et de contribuer durablement au développement socio-économique de notre continent. C’est là tout l’intérêt de ce consortium : au-delà d’apporter une expertise, un savoir-faire, nous cherchons également les fonds nécessaires au développement de projets ciblés. De fait, il restait effectivement un pilier pour compléter notre organisation : le financement. Nous avons des capacités de production et d’exécution, mais elles nécessitent une capacité de mobilisation du financement. Et cela, en Afrique, est l’un des principaux problèmes. Nous avons donc mis en place un groupement avec des accords multilatéraux et des partenariats avec des banques mais également des institutions financières panafricaines, dont la Banque africaine de développement et Afreximbank, entre autres. Nous entretenons également une étroite collaboration avec d’autres institutions internationales telles que la Banque arabe de développement. 


Vous amenez également avec vous, les partenaires non égyptiens de vos membres…

En effet. De par son positionnement géographique, au carrefour des continents, l’Egypte représente une porte d’entrée vers le marché africain, et a la capacité de favoriser un certain nombre triangulations, notamment avec les parties prenantes africaines et européennes. Nous regroupons aujourd’hui 34 sociétés exécutantes, dont 80% de sociétés égyptiennes, auxquelles s’ajoutent 4 partenaires de type think tank et entités financières. Plusieurs entreprises internationales sont également partenaires d’EGAAD, telles qu’Egis- une société d’ingénierie dont l’un des actionnaires est la Caisse de dépôt et de consignation- le Groupe Loukil, Vivendi Sports et Stronghold Global Finance, entre autres.


Concrètement, comment le consortium fonctionne-t-il aujourd’hui ?

Notre activité a démarré en 2019. Aujourd’hui, malgré le fort ralentissement qui a été causé par la crise sanitaire. EGAAD est actif dans 8 pays africains, avec plus de 12 projets qui totalisent un investissement cumulé de 1.976 milliard de dollars et de nombreux nouveaux chantiers et partenariats en cours de discussion, notamment dans le secteur de l’énergie. Nous avons pour ambition de renforcer l’indépendance économique africaine, à travers le développement des infrastructures locales, et ainsi contribuer à la stabilisation durable des marchés africains. Un schéma d’entraide est imposé dans le cadre du développement de nos projets. Il prend la forme d’une collaboration entre nos entreprises membres, plusieurs PME égyptiennes sous-traitantes ainsi que des partenaires locaux.


Quels types de projets sont ciblés ? Et selon quelle feuille de route ?

Les projets sont variés : cela va du traitement de l’eau à la construction de routes, la transformation agricole, la transformation digitale, les énergies renouvelables, les mines ou encore le tourisme. Autant de secteurs stratégiques et de projets à fort impact. Nous travaillons essentiellement pour l‘Afrique parce que nous sommes convaincus que l’Afrique ne peut être construite que par les sociétés africaines. Nous nous appuyons également sur des modèles de triangulation, par exemple avec le Maroc, l’Afrique du Sud, la Tunisie, et les pays européens, entre autres. L’idée est de mutualiser les efforts. Les sociétés égyptiennes sont très fortes dans l’exécution. Il y a une vision du risque qui diffère des Européens, parce que nous avons des racines africaines très fortes et une présence historique.  En ce moment par exemple, nous travaillons sur la transformation agricole avec un ambitieux projet d’irrigation au Denguele, en Côte d’Ivoire. L’idée est de passer du système actuel, basé sur la récupération d’eau de pluie, à l’irrigation régulière avec un système rotatif, ce qui permettra de produire du riz sur six mois et alterner les productions, riz, maïs et soja, sur 50 000 ha. L’Afrique est potentiellement le grenier agricole du monde. Mais il faut accélérer la transformation agricole afin de créer une chaîne de valeur complète. Ceci vaut également pour le secteur minier. Il faut relocaliser les usines de transformation en Afrique et il est essentiel d’investir dans l’énergie, les routes et les formations, afin de ne pas être simplement l’usine du monde. C’est sur ces points clés que nous travaillons.


Sur le volet formation, comment participez-vous au transfert de compétence ? Recrutez-vous et formez-vous localement?

Nous avons adopté une règle : on ne peut appartenir au consortium que si l’on intègre 30% de contenu, main d’œuvre et produits locaux. Si on ne trouve pas de ressources locales, on travaille avec des partenaires du pays que l’on forme. De même, si les matériaux sont disponibles, on s’impose de les utiliser, quitte à amener les investissements pour les transformer. S’il y a du ciment mais pas d’usine, nous la créons, ce qui est par exemple le cas de notre usine de sidérurgie au Kenya. Au final, nous voulons créer de la richesse et du savoir-faire, comme nous l’avons fait en Egypte, et les partager à travers le continent.


Légende photo : Reda Boulos interrogé par des journalistes et s’exprimant aux côtés de Naguib Sawiris, patron du groupe Orascom TMT Investments. Crédit-photo : DR

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