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Les banques africaines sont- elles disruptives ?

JC Samnick Mbombue
Le terme «disruptif», qui vient du latin disrumpere, rompre, est à la mode et désigne l’action qui consiste à détourner ou aller à l’encontre des codes du marché pour vendre un produit ou un service. L’émergence du mobile banking grâce à M-Pesa au Kenya a rapidement fait passer l’Afrique pour une zone favorable à la disruption. Car toutes les grandes entreprises de télécommunications et de services financiers se sont emparées de l’idée pour la recréer à leur sauce. Mais les autres services sont-ils aussi disruptifs?

Le développement des transferts d’argent à partir du téléphone par certains opérateurs a contraint les banques à développer leurs propres applications. Celles-ci permettent aux clients de visualiser leur compte, d’effectuer les opérations courantes et bien évidemment de transférer de l’argent de compte à compte. De plus, elles permettent, en liaison avec de grands opérateurs de téléphonie dans certains cas, de passer par leur plateforme de transfert pour envoyer ou recevoir des fonds. En cela, les banques africaines ont rompu avec l’utilisation de la sacro-sainte agence et de ses caisses bondées pour effectuer des opérations.
Cela a permis de répondre au défi numéro un de tout banquier africain, le faible taux de ancarisation. Il est plus simple pour l’habitant d’une région reculée de prendre son téléphone pour payer – avec une application de mobile money – de l’essence ou des produits alimentaires, sans avoir à faire des kilomètres pour trouver une agence bancaire. Et cela réduit aussi les vols, car il n’y a pas d’échange de liquidités.
Autre service disruptif, la possibilité pour les clients d’effectuer leurs opérations jusqu’à 20 heures dans certaines agences. Le gain pour les banques est double : cela permet d’avoir des dépôts en plus, qui sinon seraient restés dans la caisse du client, mais aussi de facturer ce service nouveau. Les services financiers sont gagnants dans cette course à l’innovation. Car le retard technologique pris par ces banques est rattrapé. Alors, la question de l’emploi se pose. Car qui dit innovation, dit aussi remplacement de l’humain par des machines. Mais d’autres fonctions sont créées, notamment dans le back-office, pour suivre ces transactions. Les banques profitent aussi de l’apport de clients nouveaux grâce à ces progrès.
Les «robo-advisors» ont fait leur entrée dans certaines agences occidentales et vont bientôt éclore partout, pour guider les pas des clients lors de leurs souscriptions et pour certains services de base. Ces robots dotés d’intelligence artificielle sont déjà utilisés pour activer les ouvertures de compte. Dans une grande banque, toutes les demandes d’ouverture sont regroupées dans un fichier Excel et le robot passe sur le dossier de chaque client et active le compte dans l’ERM de la banque. Cela permet dans certains cas d’ouvrir 300 comptes par jour lors de la clôture de journée. Or il fallait auparavant deux à trois personnes pendant trois heures pour faire les activations en fin de journée.
Alors oui, les employés des pays africains, peu qualifiés et mal formés aux nouvelles technologies, ont du souci à se faire. Mais la nouvelle génération est composée de personnes en phase avec la fintech et qui ne devraient pas avoir de mal à se recycler. C’est aussi une chance pour les banques locales, car elles peuvent ainsi faire un saut technologique à peu de frais en implantant directement ces innovations dans leurs réseaux et bénéficier des derniers outils de gestion bancaire. L’Afrique est en mouvement permanent et la complexité de ses sociétés ainsi que l’étendue des territoires à couvrir pour une banque obligent les dirigeants à être inventifs et à créer justement de nouveaux services, forcément disruptifs.

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