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Télécoms, Le Champ De Tous Les Possibles Africains

Facteur de disruption massive en Afrique, les télécoms sont bousculées par de nouveaux acteurs qui poussent les géants du secteur à se réinventer. Entre hypercompétitivité, investissements infrastructurels et défis réglementaires, quelles sont les grandes tendances du marché ?

Par Marie-France Reveillard


Les années 2005-2013 représentaient une phase de forte expansion de la téléphonie mobile en Afrique mais aujourd’hui, le revenu marginal par abonné s’est réduit comme peau de chagrin, et les seuils de rentabilité sont à la peine. Les coûts des licences de téléphonie mobile sont exponentiels et les capitaux peinent à converger vers le continent du « Next Billion Users », qui concentre une concurrence de plus en plus vive. Aux côtés de géants de la téléphonie comme MTN, Orange ou Vodacom, de nouveaux acteurs, notamment locaux, cherchent à se tailler la part du lion, comme Tizeti (Nigéria) ou Axian (Madagascar). En quatre ans, le groupe malgache a ainsi doublé ses effectifs (6 400 collaborateurs) et enregistre un chiffre d’affaires de 1,9 milliard de dollars (1,69 milliard d’euros). Après avoir étendu ses activités dans l’océan Indien, au Togo et au Sénégal, il a poursuivi ses acquisitions en rachetant Tigo, second opérateur télécom en Tanzanie, en 2022.

L’hypercompétitivité des acteurs des télécoms s’illustre sur tous les segments. Ainsi, en 2021, la start-up Wave faisait une entrée fracassante dans le petit monde du mobile money au Sénégal puis en Côte d’Ivoire, où l’entreprise pratiqua la gratuité des retraits ainsi qu’un taux de 1 % sur les transferts monétaires. Un coup dur pour des opérateurs traditionnels comme Orange, qui ont dû s’aligner sur les prix cassés du pingouin californien, tout en diversifiant leurs offres. « Un Africain sur dix est un client Orange », aime à rappeler Christel Heydemann, la directrice générale du groupe, qui souligne que la performance d’Orange est « tirée par la remarquable croissance de la zone Afrique et Moyen-Orient ».


L’Afrique Subsaharienne Ou l’Épicentre Mondial du Mobile Money

Lancée en 2007 par l’opérateur Safaricom au Kenya, M-Pesa fut le premier service de mobile money au monde, et est depuis devenu synonyme d’inclusion financière. Dans son sillage sont apparus de nouveaux services de m-payment avec MTN (MoMo), Orange (Orange Money) ou Moov (Moov Money). Les usages se sont diversifiés, allant des simples achats au paiement des factures et des salaires. « Nous avons plus de 6 millions d’abonnés, avec une croissance supérieure à 30 % par an (…) C’est l’une des clés de l’inclusion économique et financière », explique Khalil Al Americani, directeur général de Vodacom Congo, précisant qu’en République démocratique du Congo, près d’« un tiers du PIB transite par M-Pesa ». Selon le dernier rapport de l’Association mondiale des opérateurs et constructeurs de téléphonie mobile (GSMA), il existe 1,35 milliard de comptes enregistrés dans le monde, traitant 1 000 milliards de dollars (un peu plus de 900 milliards d’euros) par an d’opérations et, avec 605 millions de comptes enregistrés et 697 milliards de dollars (environ 623 milliards d’euros) de transactions, l’Afrique est devenue l’épicentre mondial du mobile money. Les flux d’opérations enregistrés entre les banques et les plateformes de mobile money ont plus que doublé depuis 2019. Fin avril 2023, le « Rapport sur l’état de l’industrie de l’argent mobile 2023 » de la GSMA indiquait que le nombre de comptes mobile money enregistrés avait augmenté de 13 % pour atteindre 1,6 milliard fin 2022. En Afrique subsaharienne, plus qu’un choix technologique, le mobile money est venu combler un déficit de bancarisation qui culminait à 55 % de la population en 2021, selon les données de la Banque mondiale.

Selon le dernier rapport de la GSMA, il existe 1,35 milliard de comptes enregistrés dans le monde, traitant 1 000 milliards de dollars (un peu plus de 900 milliards d’euros) par an d’opérations et, avec 605 millions de comptes enregistrés et 697 milliards de dollars (environ 623 milliards d’euros) de transactions, l’Afrique est devenue l’épicentre mondial du mobile money. ©Litvinov


L’Afrique Est-Elle Prête Pour La 5G ?

Si la 3G domine encore la connectivité en Afrique subsaharienne, elle ne devrait plus représenter que la moitié du total des connexions d’ici 2025 selon la GSMA, tandis que la 4G concentrera un tiers des connexions mobiles. Celle-ci représente pourtant « un élément structurel de la digitalisation » permettant « d’entrer de plain-pied dans la révolution numérique », estime le DG de Vodacom Congo, qui consacre 100 millions de dollars (près de 90 millions d’euros) par an au développement de son infrastructure réseau. À l’heure de l’IoT [Internet of things ou « Internet des objets », soit l’interconnexion entre l’Internet et des objets, des lieux et des environnements physiques, NDLR] et du développement de l’intelligence artificielle (IA), qui bouleversent les usages, la 5G est désormais dans le collimateur des opérateurs présents sur le continent. Malgré les défis qu’elle recouvre, la « cinquième génération » a fait son apparition en Afrique du Sud (2018), avant de se déployer au Nigéria, au Lesotho, au Togo, aux Seychelles, à Maurice, au Kenya, en Éthiopie, au Zimbabwe et en Tanzanie. Pourtant, en 2025, elle ne devrait pas dépasser 4 % du total des connexions en Afrique subsaharienne, selon le rapport The Mobile Economy Sub-Saharan Africa 2022 de la GSMA. Entre les coûts élevés des technologies de liaison et des stations de base mobiles, mais aussi les prix prohibitifs des smartphones qui restent l’apanage d’une population urbaine favorisée, la démocratisation de la 5G en Afrique subsaharienne apparaît comme une réalité encore bien lointaine…

©Dilok Klaisataporn/Shutterstock


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